serial fucker

Rendez-vous dans le XIIème arrondissement de Paris. Erik Rémès, "la Pute de la Porte Dorée", ouvre les portes de son nouvel intérieur. On l’imaginait trash, bordélique, limite crade. Loin s’en faut. Chez l’écrivain, on remarque l’écran d’ordinateur, son principal interlocuteur, un chat inquisiteur, quelques toiles signées de sa main. Entre deux réponses, il sert le thé, impassible. Erik Rémès, romancier et journaliste provocateur, aurait changé. "Je ne suis pas BerlinTintin (son personnage fictif, ndlr), je suis bien plus apaisé". Dans "Gai-Pied", à "Illico", "E-male" ou encore "Nova Mag", il a longtemps parlé du sida en terme préventif. "Je bande donc je suis", son premier roman (publié en 1999 par Guillaume Dustan au Rayon Gay des éditions Balland), a révélé sa part obscure, cachée. Nuisible diront certains. Depuis, le barebacker est devenu, avec Dustan, l’autre bête noire d’Act Up. "Sérial fucker", son nouveau roman, n’arrangera pas les choses, qui fustige des personnalités publiques (Didier Lestrade en tête) et encense le mode de vie BBK (bareback). Néanmoins, pour l’intéressé, "il n’est pas que dans une optique de provocation". "Mon roman fait partie d’une vérité parmi d’autres, je ne veux pas me poser en dogme. Je me bats pour les idées individuelles, Act Up se bat contre un virus."

Diplômé de maîtrises en psycho-clinique et en philosophie, Erik Rémès s’est toujours dit "humaniste". Ce qui ne l’empêche pas d’être le "vilain petit canard", celui qui pousse les gens à bout. "Je suis un emmerdeur, j’aime soulever des problèmes." Après avoir évoqué le SM (dans "Le maître des amours", son deuxième roman), et la libération homosexuelle en général, il s’apprête à sortir chez Blanche, son nouvel éditeur, un "Guide du sexe gay". Suivi d’un guide lesbien auquel il travaille avec Cy Yung, puis un autre, transversal… Pour l’heure, il s’attelle à un roman sur la sexualité des enfants, "sujet encore polémique". "On est dans un monde de faux-semblants et d’hypocrisie, le seul moyen d’en sortir, c’est la vérité."

A 38 ans, en anarchiste convaincu, il a décidé d’aller encore plus loin, de dévoiler des choses qu’il n’a pas encore dites. "Oui, j’ai contaminé des gens". S’il radicalise son discours, c’est "pour pousser à bout la logique de l’irrespect". "Les extrêmes peuvent servir de révélateur pour les autres". Fils de commissaire de police dans les RG, l’ancien enfant de chœur admet avoir "un problème très infantile vis-à-vis de la loi, de l’ordre". Et refuse de céder aux pressions qui le menacent. "Un écrivain n’est pas là pour donner une image positive de la communauté". En privé, Erik Rémès se dit de plus en plus attiré par les séronégatifs. Obligé, c’est un comble, de pratiquer parfois le safe-sex. Il finit par lâcher la plus détonante des bombes : "Je suis un garçon très romantique, prévenant, attentionné. Je suis très fleur bleue."

julien grunberg