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Sadomasochisme, SM 2

 



Une sexualité sensuelle et non pénétrante Copyright Sexe guide, Erik Rémès, Blanche 2004

Avec les pratiques hards, il est possible d'avoir des sensations fortes sans en passer par la pénétration. Beaucoup de pratiques SM ne font couler ni le sperme ni le sang et évitent donc la transmission des virus, VIH, hépatite. Les règles de safer sexe sont simples : pas d'échange de fluides contaminants (sperme et sang) entre eux (soit directement, soit par l'intermédiaire d'un instrument) ; pas non plus de contact de ces liquides avec les muqueuses (bouche, anus, vagin, gland) ou avec des écorchures. Des préservatifs sont utilisés pour les pénétrations, des gants pour le fist et du matériel désinfecté avant chaque usage et entre chaque partenaire.

Valérie que nous avons rencontrée dans une soirée parisienne annonce : avant, je croyais que les plans bougies, le fouet, le fist et tout le toutim, c'était des jeux d'abrutis, pour de gens tarés, bons pour le psy. Depuis, grâce à mon mari, j'ai découvert le SM. Ce n'est pas forcément sexuel, c'est plutôt sensuel, c'est quelque chose dans la tête, pas dans le sexe. En fait, je dirais que je masturbe mon ego avec le SM. À la fin d'un plan, je me réjouis d'être allé à un point que je ne m'imaginais pas pouvoir atteindre, d'avoir éprouvé autant de plaisir, de me sentir aussi forte.

Ouverture de nouveaux bars cuirs et échangistes, de sex-shops, renouveau des back room (chambre noire), « soirée SM » : les scènes cuirs connaissent un sacré engouement depuis la fin du xxe siècle. Le SM est devenu un phénomène de mode. Il se démocratise et se surmédiatise tant à la télé que dans la presse écrite. Bien des fantasmes circulent au sujet du SM et du monde cuir. Pourtant, comme le disent les hardeurs, ces pratiques sont avant tout des expériences librement consenties entre deux ou plusieurs partenaires. Ce plaisir, très « cérébral », n'a rien à voir avec une agression ni un viol mais relève plutôt de la découverte de sa sexualité. La plaquette de prévention Hard ok, safe ok produite par l'Agence Française de lutte contre le sida et que j'ai co-écrite avec l'ASMF (association gay sado-maso) en 1992, fixe les règles du jeu : « Nous aimons les relations hards, mais pas la brutalité gratuite. C'est dans le respect de nos partenaires, de leurs désirs, des nôtres et de nous-même que nous vivons cette recherche du plaisir. Il y a des règles et des codes à respecter que nous avons établis : quand l'un dit « stop », l'autre arrête tout ».

Pour les personnes SM, la confiance est donc un préalable qui permet de se laisser aller et se donner. Le cheminement dans le SM est un peu un parcours initiatique ponctué de pratiques diverses et variées. Pour les hardeurs, il est fascinant de voir qu'on peut aller aussi loin avec sa sexualité. Les SM sont des aventuriers du sexe, qui aiment dépasser leurs limites et les interdits. Cela agrandit leur liberté et, par ricochet, celles des autres. Mais bon, être hard, n'empêche pas de continuer à avoir des rapports tout ce qu'il y a de classique. Pour Sandrine : le SM me permet d'oublier mes belles manières, tout cet endoctrinement pédagogique, de toujours bien se comporter. On sort des relations sociales habituelles, où il faut être aimable, affable. On exprime enfin des sentiments inhabituels, comme la colère, le pouvoir ou la peur. Le SM est la sublimation de mes peurs et de mes tabou. C'est un outil de libéralisation personnel et l'expression de mes angoisses sexuelles. En exhibant mes angoisses, je deviens capable de les surmonter. Les jeux de rôle me permettent de changer de personnalité, de changer de genre, mes fonctions habituelles, de renverser les emplois. Pour Sophie, maîtresse : le SM, c'est se donner le droit d'être pur et ultime, de jouer encore, à l'âge adulte, de se déguiser comme on veut, en flic, en sirène de latex, d'être à la fois une autre et soi-même, supérieurement soi-même, et s'offrir des moments où, comme quand on a sept ans, tout est possible, où on ne se refuse rien. Le SM, c'est peut-être une forme sophistiquée, parfaite de l'amour, parce qu'on choisit de vivre une histoire qu'on met en scène, qu'on verbalise, qu'on extériorise, qu'on sort de sa pente naturelle : on travaille, on cherche, on imagine ; on ne peut pas se reposer sur les lauriers lénifiants du quotidien.

 

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