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Témoignage sida : Zéronégatif Ex Eaquo, mai 2000

 



Il faut que je vous raconte une chose, sur la façon dont nous, séropos, on peut-être accueillit par les autres, Zéronégatifs. Ca se passe à un toucher rectal de l’an 2000, presque 20 ans après le début de l’épidémie : c’est formidable parfois la capacité d’évolution de l’homme ! Avec Thierry, on était avec des étudiants en psycho. À un groupe de mecs qui discutaient d’hypnose, je demandais ses effets sur la séropositivité, un garçon se fendit d’un : ah bon vous êtes concerné par la question ? Mais vous auriez vu sa tête concupiscente, cette empathie psychiatrique ! Mon jules et moi, on a éclaté de rire.

Une autre fois, c’était avec des mecs huppés en troisième cycle universitaire. Donc un milieu, a priori, cultivé. A priori. C’était une fête hétérosexuelle dans laquelle, il est vrai, on faisait un peu tâche mon mari en cuir, mes piercings, mes tatouages et moi. Voilà des tapettes contaminées devaient se dire les invités, oui-oui. Il y avait plein de gens bizarres qui osaient à peine nous serrer la main. Certains se sont éloignés de nous et très-très vite un couple est parti sans mots dire. La raison ? Ils étaient certains qu’on avait le Sida et ne voulaient pas attraper ça. Sur le coup, ça m’a fait beaucoup rire. Ca m’étonne toujours qu’il existe des gens aussi peu informés et, surtout, aussi cons. Mon régulier, lui, ça l’a beaucoup énervé, il voulait crever les pneus de leur voiture. Je l’ai retenu. Je n’aurais peut-être pas dû le retenir.

Le pompon, on l’a décroché un week-end dans la famille de mon chouchou lorsqu’il a voulu embrasser son petit neveu : son frère s’est fendu d’un je t’en prie, ne touche pas mon enfant, sous-entendu, tu risques de le contaminer. Car c’est bien connu, le Sida au troisième millénaire, ça s’attrape en serrant la main de son voisin, avec les verres mal lavés ou en se faisant enculer par un moustique. Mon Thierry, ça l’a un peu énervé. Il a foutu un coup de boule à son frère et lui a délicatement cassé les dents. Ah ! ah ! les Gentils zéronégas va !

Copyright Erik Remes, Edition Blanche-Balland

 

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