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Témoignage sida Voir la Vie en positif Gai Pied Hebdo, juin 92

 



De retour des Buttes-Chaumont, par un dimanche de printemps souriant, où j’étais allé faire bronzer mon petit cul dodu et siroter des Sexes massifs à l’abri des bosquets endimanchés devant le siège du Parti Communiste, je tombe nez à nez, oulala, sur une mère et sa mongolienne de fille. La pauvre petite ! À voir sa mère, on comprend tout. C’est le genre de femme à vous rendre autiste ou psychotique, intra-utérinement. On s’échappe comme on peut d’une matrice confusionnelle, ah ! décidément les mères ! La chère enfant était donc trisomique, c’est vrai, c’est génétique alors, pas de psycacanalyse de back-room. Mais à les voir se promener dans la rue, ombres d’un autre siècle, il semblait évident que la malheureuse enfant ne pouvait échapper à son si tragique destin, cela sautait aux yeux tel un radieux et coloré kaposi sur le nez.

La douce enfant portait l’uniforme parfait de mongolienne, le tout surmonté par une incontestable coiffure de folle (à se sujet, les couturiers devraient s’intéresser aux hôpitaux psychiatriques, il y a plein d’idées à choper). Donc : tee-shirt jaune et vert jusqu’aux genoux et bas de survêtement urine claire remonté jusqu’à ce qui pouvait évoquer une paire de seins. Car, cette petite était âgée, c’est assez rare dans cette pathologie pour le signaler. À porter son accoutrement de débile profonde, il semblait que la pauvre chérie était faite pour ça (l’habit fait la mongolienne). À croire que sa mère faisait exprès de l’accoutrer ainsi pour confirmer aux regards étrangers que, oui-oui, sa fille était bien débile : vous voyez bien qu’elle n’est pas normale, regardez comme elle se vêt !

Mais pourquoi parler de cela ? Et bien, parce que je préfère être séropo que mongolienne (quoi que je n’en sois pas très-très loin). En plus, qu’est-ce que cela fait du bien d’être mauvais et de se moquer du malheur des autres. Ca soulage, bien qu’il ne faille pas se tromper d’ennemi (l’homophobie de certains pédés en est un bel exemple) !

Tiens, cela serait une bonne idée pour Aides, la World Compagnie de la Lutte. Après leurs groupes de parole pour séropos sourds et muets, les ateliers de peintures pour les sidéens aveugles au cytomégalovirus, les ateliers poteries Réalisez vous-même votre urne funéraire ou celle de votre petit ami sponsorisé par la Mairie de Paris et les ateliers musicaux spécial bande-son de crémation, voilà donc les groupes d’auto-support pour mongoliennes et leur mère et pour les tapioles séropositives ou pas qui se régalent du malheur des autres. Ca aurait un beau succès.

Copyright Erik Remes, Edition Blanche-Balland

 

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